1ère journée spirituelle - 2 décembre 2020

Publié le par Père Maurice Fourmond

 Prévoyance et abandon

 

Prévoyance

 

Dans l’évangile du premier dimanche de l’Avent, nous avons entendu Jésus nous demander de veiller car nous ne savons ni le jour, ni l’heure de la venue du Fils de l’homme, c’est-à-dire pour nous de notre rencontre avec Dieu. Cette rencontre sera définitive et parfaite au terme de notre vie, mais déjà, elle est quotidienne, elle est aujourd’hui, car Dieu est toujours et à chaque instant à la porte de notre cœur. À nous de nous rendre présents à cette présence à certains moments privilégiés, mais aussi et d’abord dans notre désir aimant. Et Jésus, pour bien montrer la nécessité d’être vigilant afin de reconnaître cette présence, emploie la parabole des deux hommes dans leur champ et de deux femmes en train de moudre le grain : l’un est pris et l’autre pas.

 

Il n’est pas dit explicitement que l’un des deux personnages de la parabole ait été plus vigilant que l’autre et Jésus ne précise pas en quoi l’homme pris dans son champ et la femme prise en train de moudre ont été particulièrement vigilants. On peut seulement penser que le choix n’est pas un choix arbitraire, mais en fonction de la vie des différents personnages.

 

Cependant, le but de cet évangile n’est pas de nous présenter une discrimination entre les personnes : certaines étant prises et d’autres laissées ; il entend nous alerter sur l’incertitude quant au jour de la venue du Seigneur et la nécessité d’être vigilant et ne pas se laisser surprendre. C’est le même message dans une autre parabole, celle des demoiselles d’honneur qui doivent accompagner l’époux jusqu’au repas de noces. (Mt 25, 1-13). Elles ont toutes la responsabilité d’accompagner l’époux et donc d’éclairer son chemin jusqu’à la salle des noces. Pour cela, leurs lampes doivent être prêtes, l’huile ne doit pas manquer. Cependant, les unes sont prévoyantes et pas les autres, alors les unes entrent dans la salle de la noce et les autres, arrivant trop tard, trouvent la porte fermée et ne sont pas reconnues par l’époux.

Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus entend nous montrer qu’il convient à la fois d’être prêt et pour cela, comme pour les demoiselles d’honneur, d’être prévoyant.

 

Mais, la prévoyance n’est-elle pas contraire à cette insouciance demandée plusieurs fois dans les évangiles : comme les oiseaux qui ne filent ni ne moissonnent : « C’est pourquoi je vous dis : Ne vous souciez pas, pour votre vie, de ce que vous mangerez, ni, pour votre corps, de quoi vous le vêtirez. La vie ne vaut-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que les vêtements ? Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n’amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Vous-mêmes, ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? (Mt 6, 25-26) ; ou encore « Ne vous faites pas de souci pour demain : demain aura souci de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine » (Mt 6, 34).

 

Alors, l’évangile se contredit-il ou peut-on être à la fois prévoyants et abandonnés ? Ces deux exigences ne se contredisent pas parce qu’elles se vivent toutes deux dans un climat d’amour authentique et l’évangile parle toujours de relations d’amour. Ces deux exigences de prévoyance et d’abandon sont tout à fait compatibles pour ceux qui aiment car, comme tout amour, elles mettent en jeu à la fois la confiance et la raison. Nous savons que pour aimer en vérité, la seule passion ou le seul sentiment ne sont pas suffisants, il faut aussi poursuivre dans cette attitude aimante et cela requiert une volonté et donc mettre en œuvre toutes nos forces. Aimer suppose donc à la fois la confiance, l’abandon et la réflexion, la prévoyance, la raison.

 

Ce matin méditons d’abord quelques minutes sur cette nécessité de la prévoyance et nous parlerons de l’abandon cet après-midi.

 

La prévoyance se fonde sur trois éléments essentiels sur lesquels nous pouvons méditer : pour notre vie spirituelle : notre responsabilité, la nécessité de voir au-delà de l’apparence et se tenir prêt.

 

La responsabilité

La prévoyance n’est pas facultative lorsque nous portons une responsabilité quelle qu’elle soit. Nous savons bien particulièrement ceux d’entre nous qui sont parents, que les parents qui ont des enfants portent la responsabilité de les conduire dans la vie, ce qui leur demande de prévoir nourriture, éducation, instruction. De même de par les responsabilités pastorales que nous avons eues comme prêtres, il nous fallait bien prévoir comment aider notre communauté à avancer. Pour les célibataires comme pour toute personne humaine, les divers engagements pris comportent une responsabilité qui implique une certaine prévoyance.

 

Certes, un certain nombre d’événements échappe à notre contrôle. Il nous faut alors les assumer et en tirer ce qui est le bon ou le moins mal pour nous et pour les autres. Mais il y a des événements qui sont prévisibles : c’était le cas des demoiselles d’honneur de la parabole de Jésus qui, si elles ignoraient le moment exact de la venue de l’époux, avaient cette connaissance quasi certaine qu’il allait survenir pendant la nuit. Elles avaient donc une responsabilité, celle de l’accueillir à son arrivée et de l’accompagner avec leur lumière jusqu’à la salle des noces. C’est au nom de cette responsabilité acceptée que la prévoyance devient une nécessité morale et spirituelle. Cette responsabilité impliquait que, de nuit, ces demoiselles accompagnent l’époux avec de la lumière. Il leur importait donc d’avoir, quelle que soit l’heure, une lampe en état de marche ; d’où la nécessité de prévoir l’huile nécessaire si la venue de l’époux était tardive dans la nuit.

 

Nos responsabilités sont de différents ordres. Elles peuvent être en raison d’une situation imposée, d’une tâche qui nous est confiée ou d’un engagement librement accepté.

 

C’est ainsi que déjà, même si nous n’avons pas choisi d’exister, nous portons la responsabilité de mener, selon nos moyens, notre vie la meilleure possible pour nous-mêmes et pour ceux qui nous entourent. On dira : comment être responsable de ce que nous n’avons pas choisi ? C’est que notre vie n’est pas solitaire, elle est en relation avec les autres et cette relation est un fait que nous le voulions ou non. Cette relation nous impose, autant que nous le pouvons, de faire en sorte qu’elle construise des vies un peu positives et heureuses.

 

Mais il y a les tâches qui nous sont confiées. Pour les prêtres, ce sont les divers ministères que nous avons reçus ; pour les personnes mariées, la responsabilité vis-à-vis du conjoint et des enfants, pour les célibataires comme aussi pour chacun, les tâches confiées à travers la vie professionnelle ou les divers engagements… Bien sûr, nous avons conscience qu’aujourd’hui, à Marie-Thérèse, nos responsabilités sont bien limitées. Toutefois, nous sommes en relation les uns avec les autres, entre résidents, mais aussi avec tout le personnel soignant, avec nos familles et nos amis. Ces relations ne sont pas neutres et il nous appartient qu’elles soient plus ou moins bonnes et heureuses pour chacun.

 

C’est au nom de cette responsabilité, si modeste soit-elle, qu’il nous faut essayer d’organiser un peu notre vie pour que ceux qui nous entourent vivent le mieux ou le moins mal possible. Il y a donc une part de prévoyance même dans notre situation de dépendance.

 

Regarder au-delà de l’apparence

Pour prévoir, il convient d’être en phase avec le réel d’où ce deuxième aspect de la prévoyance : la capacité à regarder les personnes et les choses au-delà de l’apparence. J’ai envie de dire que c’est précisément la vocation de prophète que nous avons reçue au moment de notre baptême. Le prophète n’est pas celui qui prédit l’avenir, mais celui qui voit la vérité des êtres et des choses au-delà de l’apparence. Grâce à l’Esprit Saint, le prophète voit un peu comme Dieu voit. C’est en voyant avec le regard de Dieu que nous pouvons prévoir dans la vérité ce que nos responsabilités nous demandent de faire. C’est en fonction de ce réel perçu sous le regard de Dieu qu’il convient d’avoir cette prévoyance que nous demande l’évangile et que plusieurs des demoiselles de la parabole n’ont pas su faire ; elles pensaient peut-être que leur huile était suffisante pour durer toute la nuit, se trompant sur la réalité des choses. Nous comprenons l’importance pour nous d’avoir ce lien profond avec la présence mystérieuse de l’Esprit Saint, qui, comme le dit saint Paul, habite en chacun de nous. Prévoir, c’est voir avec un regard éclairé par l’Esprit Saint afin de rester dans la réalité des êtres et des choses et non dans l’illusion de notre imaginaire.

 

Le regard de Dieu est un regard qui aime quelle que soit la situation. Trop souvent, nous avons un regard qui juge trop vite, nous fiant à l’apparence ou à nos désirs illusoires. La prévoyance consistera donc à ne pas trop nous tromper de regard en sorte que, éclairés par le regard de Dieu, nous soyons aptes à discerner avec bienveillance mais aussi avec vérité, les événements de notre vie. Alors, nous serons prêts à répondre à ce que Dieu attend de nous autant qu’il nous est possible de le discerner.

 

Se tenir prêt

Enfin un troisième aspect de la prévoyance consiste à se tenir prêt. C’est la fin de l’évangile que nous allons entendre tout à l’heure : « Ainsi donc, tenez-vous prêts vous aussi ». Un certain nombre d’entre vous ont été scouts ou guides avec cette devise « toujours prêts ». Être prêt ne consiste pas à ne rien faire sinon attendre. Être prêt c’est bien faire tout simplement ce qu’il convient de faire à chaque moment. Quand j’étais petit, on m’avait lu la vie de Guy de Fontgalan, un enfant ; on avait demandé à cet enfant : si tu savais que tu allais mourir dans quelques minutes, qu’est-ce que tu ferais ? Et l’enfant répondit « je continuerais à jouer ! » Être prêt, c’est faire au mieux ce que le moment présent demande de faire. J’ai souvenir d’une question qui m’était posée par des séminaristes, inquiets sur leur fidélité de demain, lorsque, ayant quitté le séminaire, ils seraient plongés dans le tourbillon du ministère. Je leur avais répondu : c’est votre fidélité d’aujourd’hui qui est garante de votre fidélité de demain. Certes, je n’éliminais pas l’hypothèse d’événements qui pourraient modifier la trajectoire de la vie, mais je voulais dire que l’effort d’aujourd’hui pour être fidèle constitue un socle solide pour surmonter les difficultés futures.

 

Alors, au cours de l’eucharistie que nous allons vivre dans quelques instants, demandons la grâce de l’Esprit Saint pour construire aujourd’hui les moyens qui nous permettront d’être prêts pour la venue du Seigneur quelle que soit l’heure de sa visite.

 

 

Abandon

 

Nous avons médité ce matin sur la nécessité d’être prêt avec l’impératif de la prévoyance ; comme le dit Jésus, si le maître de maison savait que des voleurs allaient venir la nuit, il aurait veillé et n’aurait pas permis qu’on perçât les murs de sa demeure. Jésus entend nous dire que notre vie rencontre des obstacles qui peuvent abîmer ou même détruire ce que nous asseyons de vivre. La possibilité de la tentation n’est nullement illusoire et nous savons, par expérience que le mal se présente à nous sous les couleurs du bien comme pour Jésus au désert, d’où la nécessité d’être vigilants.

 

Mais, comme nous le disions ce matin, la prévoyance est-elle en contradiction avec ce que Jésus nous dit de ne pas nous soucier comment nous allons manger ou nous vêtir ? Tout dépend du sens que nous donnons à notre façon de vivre les soucis ou les difficultés qui ne manquent pas de nous atteindre. En effet, on peut vivre la présence de soucis ou plus gravement, d’épreuves, de façons bien différentes. On peut être dépassé par les soucis ; ceux-ci nous envahissent au point qu’il nous est impossible de penser à autre chose, ni même de discerner leur importance ou leur impact dans notre vie et la vie des autres. Dans ce cas, le souci devient une forme d’esclavage nous empêchant de penser avec justesse et très souvent nous empêchant de prendre les bonnes décisions. Les soucis ou les épreuves ne nous permettent pas d’avoir assez de recul pour un discernement objectif sérieux.

 

Ce dont Jésus nous met en garde, c’est le souci qui nie l’espérance, c’est-à-dire qui oublie ou qui nie la confiance en la présence aimante de quelqu’un qui nous accompagne, la présence de Dieu. Cette présence ne modifie pas la réalité des choses ou des événements, mais elle nous apporte la lumière et le courage nécessaires pour assumer ce qui nous arrive et l’orienter vers un « plus » de vie.

 

Nous voudrions que Dieu modifie miraculeusement les événements douloureux de notre vie et résolve, à notre place, les difficultés qui surviennent. Ce serait oublier que Dieu nous donne toutes choses à gérer, selon ce qui est dit dans le livre de la Genèse. Dieu confie à notre responsabilité humaine le soin d’avancer dans notre vie avec les joies, les difficultés ou les drames qui la traversent. Mais il nous assure que la lumière et la force de son Esprit ne nous manqueront pas pour porter ce qui vient bouleverser notre existence.

 

Ainsi Dieu n’agit pas à notre place, mais il porte avec nous chaque moment de notre vie. Vous connaissez la parole de Jésus à ses amis leur disant de prendre son joug car dit-il, mon joug est facile et mon fardeau léger. Quand on sait que le joug est cette pièce de bois qui relie deux bœufs en sorte que, ce qu’un seul ne pourrait pas traîner, deux ensemble peuvent le faire. Or nous savons que c’est Dieu qui apporte le plus de lumière et de force pour tirer la charrette de notre vie.

 

C’est cette certitude de notre foi qui nous permet de nous abandonner à Dieu ; ce n’est pas attendre que Dieu agisse, mais sûrs de sa présence, c’est faire confiance en son soutien quotidien et agir dans cette présence de notre Seigneur.

C’est la foi en cette présence de Dieu en nous, qui nous permet d’avoir la distance indispensable pour mieux comprendre et assumer ce qui nous arrive. Cette présence nous permet d’avoir la confiance nécessaire pour vivre non pas sereinement, mais dans une paix intérieure profonde, les difficultés que nous traversons. C’est cette confiance en Dieu qui nous situe dans un abandon filial.

 

L’abandon filial est bien ce que Jésus n’a cessé de vivre tout au long de sa vie. Pour comprendre la force de cet abandon filial et comment nous pouvons nous placer paisiblement dans la confiance, regardons comment certaines personnes particulièrement proches de Dieu, ont réagi devant de graves difficultés. Prenons quelques exemples à travers la Parole de Dieu, dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament.

 

Dans l’Ancien Testament, j’évoquerai trois personnages : Élie fuyant la colère de Jézabel, Jérémie jeté dans la citerne asséchée et boueuse et le personnage de Job.

Dans le Nouveau Testament le récit de la tempête apaisée et l’exemple de saint Paul.

 

Élie

Vous connaissez l’histoire d’Élie. Il s’enfuit pour échapper à la colère de la reine Jézabel. Après une longue marche dans le désert, il est désespéré, il ne veut plus continuer sa fuite, il se couche et attend la mort : « Élie marcha toute une journée dans le désert. Il vint s’asseoir à l’ombre d’un buisson, et demanda la mort en disant : maintenant, Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma vie : je ne vaux pas mieux que mes pères » (1 R 19, 4). Élie pense qu’il ne peut pas surmonter l’épreuve qui le touche. Vous connaissez la suite, en se réveillant, Élie trouve du pain et une cruche d’eau tandis qu’une voix intérieure lui disait de se nourrir car il lui restait une longue marche à faire. Réconforté par cette nourriture, Élie va reprendre la route jusqu’au mont Horeb. Là, Dieu se manifeste à lui, non pas de façon spectaculaire, mais « dans un fin silence ». Puis Dieu lui demande de retourner au pays d’où il s’était enfui. Sûr de la présence de Dieu, Élie s’abandonne à cette présence et, soutenu par l’Esprit de Dieu, il repart au pays d’Israël malgré le risque pour sa vie. Bel exemple de cet abandon à Dieu. Dieu ne lui dit pas qu’il va détourner la fureur de Jézabel, ni qu’il va aplanir le chemin de son prophète. Non, il l’assure seulement de sa constante présence et de la force qu’elle peut lui donner.

 

Jérémie

La situation de Jérémie n’est pas plus brillante. Son pays est attaqué par les assyriens. Jérémie, éclairé par l’Esprit de Dieu, avertit les responsables que l’armée d’Israël ne pourra pas vaincre l’ennemi. Considéré comme un défaitiste et un traître, Jérémie est jeté dans une fosse boueuse. Jérémie pourrait penser qu’il a échoué. Il se rappelle alors la présence constante de Dieu lui affirmant à maintes reprises « Je serai avec toi ». Il se rappelle la promesse de Dieu citée tout au début du livre qui porte son nom :: « Partout où je t’envoie, tu y vas. N’aie peur de personne, je suis avec toi pour te délivrer » (Jr 1, 7-8). Jérémie se tourne vers Dieu pour lui dire sa confiance et un ami de Jérémie, Eved-Mélek obtint du roi que Jérémie soit sorti de la citerne.

 

Job

Citons encore le personnage de Job sur qui survient tous les malheurs du monde. Dans sa détresse, il maudit le jour de sa naissance. Ses amis tentent de lui faire comprendre que son sort est juste car il est un pécheur et qu’il lui faut se repentir, mais Job a le sentiment qu’il n’a pas manqué devant Dieu et malgré tout ce qui lui arrive, il fait confiance à son Seigneur comme l’exprime ce cri d’espérance : « Mais je sais, moi, que mon rédempteur est vivant, que, le dernier, il se lèvera sur la poussière ; et quand bien même on m’arracherait la peau, de ma chair je verrai Dieu. Je le verrai » (Jb 19, 25-27). Quelle plus belle expression d’abandon à Dieu !

 

Et Dieu confirmera : « Or, après avoir adressé ces discours à Job, le Seigneur dit à Élifaz de Témane : « Ma colère s’est enflammée contre toi et contre tes deux amis, parce que vous n’avez pas parlé de moi avec justesse comme l’a fait mon serviteur Job » (Jb 42, 7). Job, au creux de sa détresse, s’est abandonné à Dieu et le récit s’achève sur le retour du bonheur pour l’homme qui a su, malgré tout, garder confiance en la bonté de Dieu. La confiance en Dieu ne se solde pas nécessairement par des biens terrestres comme le dit la fin du livre de Job, mais toujours par un amour plus vrai et plus fort, qui fait vivre.

 

La tempête apaisée

Ouvrons maintenant le Nouveau Testament avec ce passage bien connu de la tempête apaisée. Jésus semble dormir et ses amis le réveillent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » (Mc 4, 38). Les apôtres sont dans la détresse et ils ont le sentiment que Dieu est absent du danger qui les menace. Leur cri vers Jésus est aussi un appel au secours. Jésus réveillé impose silence à la tempête puis, s’adressant à ses amis : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? » (Mc 4, 40). Les disciples, dans leur peur d’être submergés par la tempête, avaient gardé toutefois confiance en leur maître car c’est vers lui qu’ils se tournent. Leur reproche adressé à Jésus, qui est aussi un appel au secours, est le signe à la fois de leur angoisse, mais aussi de cette certitude intérieure que Jésus peut les sauver. Entre parenthèse, il nous arrive et nous avons le droit d’adresser des reproches à Dieu, mais ces reproches ne sont le plus souvent  que le signe d’une confiance en un amour qui sauve. Dans leur peur devant cette mer en furie, ils croient en même temps que leur maître peut faire quelque chose. Ils s’abandonnent avec confiance à Jésus et « il se fit un grand calme ». Si, même avec l’angoisse au ventre, nous gardons confiance en cette présence de Dieu à tout moment, nous pouvons retrouver peut-être le calme, au moins une véritable paix intérieure : « Il se fit un grand calme ».

 

Paul

Quant à l’apôtre Paul, il développe lui-même toutes les épreuves qu’il dût traverser dans sa seconde lettre aux chrétiens de Corinthe : « Cinq fois, j’ai reçu des Juifs les trente-neuf coups de fouet ; trois fois, j’ai subi la bastonnade ; une fois, j’ai été lapidé ; trois fois, j’ai fait naufrage et je suis resté vingt-quatre heures, perdu en pleine mer. Souvent à pied sur les routes, avec les dangers des fleuves, les dangers des bandits, les dangers venant de mes frères de race, les dangers venant des païens, les dangers de la ville, les dangers du désert, les dangers de la mer, les dangers des faux frères. J’ai connu la fatigue et la peine, souvent le manque de sommeil, la faim et la soif, souvent le manque de nourriture, le froid et le manque de vêtements, sans compter tout le reste : ma préoccupation quotidienne, le souci de toutes les Églises » (2 Co 11, 24-28). Toutefois, à maintes reprises, Paul va exprimer qu’il a pleine confiance en son Seigneur et que rien ne peut le séparer de l’amour du Christ : « Alors, qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ? En effet, il est écrit : C’est pour toi qu’on nous massacre sans arrêt, qu’on nous traite en brebis d’abattoir. Mais, en tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. » (Rm 8, 35-39).

 

Demandons au Seigneur d’avoir la même confiance, le même abandon courageux que ces quelques personnages que nous venons d’évoquer. Appuyons-nous sur cette présence de Dieu, discrète mais forte et efficace, non pas pour ne rien faire, mais pour avoir cette force intérieure qui nous permet de grandir en humanité et en sainteté.

 

Dans le silence, à l’exemple de nos ancêtres, confions nos difficultés à ce Dieu qui accompagne sans cesse notre vie. Si notre barque est secouée, entendons la parole de Jésus à ses amis, « confiance, n’ayez pas peur » ; renouvelons notre confiance dans le Christ Jésus et que le calme saisisse notre cœur.

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