« Celui qui mange ma chair a la vie éternelle »

Publié le par Père Maurice Fourmond

20è dimanche  16 aout 2015

Évangile Jn6, 51-58

 

Homélie

 

    Pendant tous ces dimanches, L’Église nous fait méditer le chapitre 6 de Saint Jean sur le pain de vie. Aujourd’hui, je voudrais mettre en parallèle la parole de Jésus qui revient comme un leitmotiv « le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde », avec ce que l’évangéliste nous dit au début de son évangile : « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » Jn 1, 14. Comment ne pas voir le rapport étroit entre ces deux affirmations : « le Verbe, la Parole s’est faite chair » et celle de Jésus : « celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ».

 

    Le prologue de Jean nous aide à comprendre ce qu’il convient de mettre sous le mot « chair ». Quand l’évangéliste nous dit que la Parole, le Verbe s’et fait chair, il entend nous dire que Dieu a pris notre condition humaine dans sa totalité, chair et esprit. Le mot « chair » que l’on retrouve dans notre credo (« Je crois à la résurrection de la chair ») a été utilisé par les auteurs du Nouveau Testament pour se distinguer de tous les dualismes qui existaient à l’époque, particulièrement à travers des philosophes grecs comme Platon. Le monde sémite, le monde juif à l’époque de Jésus est totalement étranger à cette opposition entre la chair et l’esprit. Pour les compatriotes de Jésus et des apôtres, il y a une unité indissociable entre le corps et l’esprit. Lorsque nous parlons de la résurrection de la chair nous voulons simplement affirmer que la résurrection concerne la totalité de l’être humain, dans tout ce qu’il est corps et esprit.

 

    C’est pourquoi lorsque le mot chair est utilisé par Jésus, le mot désigne simplement la totalité de la vie, la totalité de la personne humaine. Ceux qui n’avaient pas une connaissance suffisante des différences majeures entre la pensée grecque et la pensée sémite pouvaient évidemment prendre le mot « chair » au pied de la lettre et s’indigner d’une telle anthropophagie. Mais si nous entrons dans la pensée du monde juif à l’époque de Jésus, nous comprenons tout autrement la parole de Jésus. Il s’agit de nous nourrir de la vie même du Christ Jésus.

 

    Revenons au prologue de l’évangile de Jean.  Jean nous dit que le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu a pris notre nature humaine dans sa totalité. Que veut dire pour nous, nous nourrir de la vie de Jésus et comment cela peut-il se faire ? Nous avons la chance de connaître cette vie du Christ à travers les récits que nous ont transmis quelques disciples du Christ. Nous nourrir de la vie du Christ consistera donc d’abord à nous nourrir de la vie de Jésus, Parole de Dieu faite chair, telle qu’elle nous est présentée dans le Nouveau Testament.

 

    Mais non seulement Jésus a laissé sa vie à travers les témoignages de ses amis, mais nous croyons que Jésus est vivant. Comment nous nourrir de ce Jésus ressuscité par l’amour du Père et vivant en Dieu pour toujours ? Il me semble que nous avons déjà une réponse dans la promesse que Jésus a faite à ses amis avant de mourir : « Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous » Jn 14, 16-17, ou encore : « Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière… Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître » Jn 16, 13-14. Après sa résurrection, Jésus donne son Esprit à ses amis : « Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint » Jn 20, 22/ On peut donc dire que se nourrir de la vie de Jésus ressuscité consiste à se laisser enseigner et conduire par cet Esprit de Jésus qui nous est donné et qui habite en nous.

 

    Enfin se nourrir du Christ nous est offert à travers les sacrements, le sacrement qu’est l’Église de Jésus Christ, le sacrement du frère, les sacrements de l’Église avec bin sûr en son coeur, le sacrement de l’eucharistie.

 

    Pour terminer je voudrais souligner cette phrase de Jésus : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle » Jn 6, 54. Jésus ne parle pas au futur « aura la vie éternelle », mais il parle au présent « il a la vie éternelle ». La vie éternelle n’est donc pas pour demain au-delà de notre mort humaine même si cette vie au moment de notre mort nous est donnée en plénitude, mais cette vie nous est offerte dès maintenant, aujourd’hui. Aujourd’hui dans ma communion à la vie de Jésus, je construit ma vie éternelle, c’est-à-dire, en partageant l’humanité de Jésus, je partage en même temps sa divinité, cette vie divine qui dit déjà ce que je suis vraiment et qui trouvera sa perfection dans le partage définitif de la vie de Dieu.

Publié dans Homélies du dimanche

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