"Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres"

Publié le par Père Maurice Fourmond

5è dimanche de Pâques C

Évangile Jean 13, 31...35

 

Homélie

 

    Ce court passage de l’évangile de Jean résume l’essentiel de la vie chrétienne et, je le pense, de toute vie humaine. Non pas que l’amour dont parle Jésus remplace les autres potentialités de l’homme, mais il en est le coeur et leur donne leur pleine dimension. N’est-ce pas d’ailleurs ce que l’apôtre Paul écrivait aux chrétiens de Corinthe dans ce fameux texte du chapitre 13 de sa première lettre. Paul énumère les plus hautes activités humaines : la connaissance (« quand j’aurais la science de tous les mystères et de toute la connaissance »), la foi (« quand j’aurais la foi la plus totale, celle qui transporte les montagnes »), la générosité (« quand je distribuerais tous mes biens aux affamés »), et Paul affirme que si toutes ces activités humaines si essentielles soient-elles ne sont pas habitées, inspirées par un amour vrai, elles ne servent à rien et la personne qui les met en oeuvre n’est rien. C’est dire l’importance de cette qualité qu’est l’amour authentique ; elle seule peut transfigurer notre humanité, lui donne son sens.

 

    Le chrétien sait que toute personne humaine sera regardée par Dieu selon l’amour dont elle aura habité sa vie. C’est ce que nous dit le chapitre 25 de Saint Matthieu sur le jugement dernier : « Venez les bénis de mon Père car j’avais faim et vous m’avez donné à manger... ». Et la première lettre de Saint Jean a cette magnifique parole : « Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu. Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu ». Cette parole montre que toute personne quels que soient son origine, sa culture, sa religion ou son athéisme et qui s’efforce de vivre d’un amour vrai non seulement signifie qu’elle est née de Dieu, mais plus encore elle est proche de Dieu.

 

    Cependant et Jésus le montre par toute sa vie, aimer en vérité est difficile. Aimer est ce qu’il y a de plus beau mais aussi de plus exigeant et de plus redoutable au regard de tout ce que l’homme peut entreprendre. Pourquoi ?

 

    Parce que la tendance naturelle de l’être humain consiste à rechercher son propre avantage alors qu’un amour vrai demande de sortir de soi afin d’entrer dans le besoin ou le désir de l’autre. L’amour fait passer de l’intérêt purement personnel à l’intérêt de l’autre ; il fait passer de la domination au service. N’est-ce pas la chemin que Jésus nous a montré lorsqu’avant son arrestation, au cours de son dernier repas avec ses amis, « il dépose son vêtement, et prend un linge dont il se ceint. Il verse ensuite de l’eau dans un bassin et commence à laver les pieds de ses disciples » Jn 13 4-5. Parce que l’amour vrai est service, il exige d’abandonner une place de maître pour se mettre à la place du serviteur et remplir l’humble service qui aide et soutient.

 

    Mais l’amour vrai est redoutable car il peut aller jusqu’au don de sa vie. On dira : c’est trop, c’est impossible. Or l’amour vrai existe et il s’est manifesté dans la passion de Jésus. Nous connaissons certainement des hommes et des femmes comme nous qui, par amour donnent leur vie. « Donner sa vie » n’est pas seulement ni d’abord perdre la vie, il y a un don de sa vie qui se vit au jour le jour souvent dans des petites choses, mais qui demandent sans cesse une force que les chrétiens appellent l’Esprit Saint. Jésus n’a pas seulement donné sa vie sur la croix, il a donné sa vie à chaque instant aussi bien à Nazareth pendant ce qu’on appelle sa vie cachée, que tout au long de son ministère public.

 

    Il y a en effet un courage de l’amour, courage pour accepter d’être transformé par l’autre, courage pour savoir donner sans avoir nécessairement un retour, courage pour pardonner lorsque l’amour que nous offrons est blessé, courage de la persévérance lorsque la nuit s’installe et que le chemin devient obscur. C’est le courage de Jésus habité par l’Esprit Saint ; c’est le courage de Jésus lorsqu’il décide de partir sur Jérusalem alors qu’il sait que les choses vont se terminer tragiquement pour lui ; courage au jardin de Gethsémani quand sa prière se veut en fidélité à la volonté du Père malgré l’angoisse qui l’étreint, courage bien sûr sur la croix lorsqu’il demande au Père de pardonner à ses bourreaux. Aimer en vérité va jusque là.

 

    Et Jésus continue à nous aimer et à donner sa vie dans cette eucharistie que nous célébrons ce soir. Alors faisons eucharistie, que notre prière soit une immense action de grâce pour cet amour divin auquel il nous est donné de participer.

Publié dans Homélies du dimanche

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