"Jésus fut conduit au désert par l'Esprit pour être tenté par le diable" Mt 4, 1-11

Publié le par Père Maurice Fourmond

Hôpital Brocas le 29 Février 2020

 

Évangile selon Saint Matthieu 4, 1-11

 

Homélie

Nous sommes peut-être étonnés que Jésus ait pu être tenté. Nous pensons que la tentation est un mal. Or la tentation n’est pas un mal, elle n’est pas un péché, elle fait tout simplement partie de la condition humaine et c’est d’y succomber librement qui est de l’ordre du péché. Jésus est vraiment homme et il est normal qu’il ait eu à subir la tentation comme le rappelle l’épître aux Hébreux : « Il (Jésus) a été éprouvé en tous point à notre ressemblance, mais sans péché » (He 4, 15). C’est pourquoi, être tenté est tout à fait normal pour les femmes et les hommes que nous sommes. Seulement il nous est demandé de résister à la tentation, c’est bien l’objet de cette demande du Notre Père : « Ne nous laisse pas entrer en tentation ».

 

L’évangile nous dit que l’Esprit le conduit au désert où, après 40 jours de jeûne, il est tenté par le diable. Nous savons que le chiffre 40 est un chiffre symbolique. Il désignait à l’époque de Jésus, la durée moyenne d’une vie humaine. C’est ainsi que les 40 ans des hébreux au désert sous la conduite de Moïse désignent une génération. C’est dire aussi que le combat pour vivre en communion avec Dieu est le fait de toute une vie. Les tentations de Jésus au début de sa vie publique symbolisent le combat que Jésus dut mener toute sa vie pour être fidèle à sa vocation et nous connaissons sa dernière tentation au jardin des oliviers avant son arrestation : « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! Cependant, non pas comme moi, je veux, mais comme toi, tu veux. » (Mt 26, 39).

C’est donc toute notre vie qu’il nous faudra lutter contre les tentations qui peuvent nous assaillir, tentations de découragement, de lassitude, d’inutilité, de convoitise, de jugements hâtifs, de désirs immodérés, tout ce que Saint Paul appelle les convoitises de la chair qui s’opposent aux impulsions de l’Esprit (Ga 5, 16). C’est jusqu’à la fin de notre vie qu’il nous faut accepter ce beau combat de la foi pour être accordés la mieux possible à l’amour de notre Dieu.

 

Vous avez sans doute remarqué que les tentations de Jésus comme d’ailleurs toute tentation se présente comme un bien pour soi, au moins un bien immédiat. C’est bien le sens des tentations de Jésus. Ce que lui propose le tentateur ce sont des moyens de mieux réussir sa mission. Le diable lui murmure à l’oreille : si tu changes les pierres en pains, tout le monde va être enthousiasmé et te proclamer roi. N’est-ce pas la même tentation de Jésus rapportée dans l’évangile de Jean après la multiplication des pains : « À la vue du signe que Jésus avait accompli, les gens disaient : « C’est vraiment lui le Prophète annoncé, celui qui vient dans le monde. » Mais Jésus savait qu’ils allaient venir l’enlever pour faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira dans la montagne, lui seul. » (Jn 6, 14-15). Dans la seconde tentation, le tentateur dit à Jésus : si tu poses un acte impossible comme te jeter du haut du Temple, et que les anges te soutiennent et te déposent à terre, tout le monde croira en toi. Enfin dit le tentateur : ton désir n’est-il pas que tous les peuples de la terre deviennent des croyants au Dieu unique, et bien, je te propose le pouvoir que j’ai sur tous les royaumes du monde à condition bien sûr que tu m’adores.

Ces tentations sont fortes, mais Jésus va résister car ce n’est pas ainsi qu’il doit accomplir sa mission : c’est seulement dans la liberté des gens que Jésus peut proposer l’amour de Dieu et que cet amour peut être accueilli.

 

Mais qu’est-ce qui a soutenu Jésus dans ses tentations ? Je pense qu’il y a deux éléments essentiels. Le premier, c’est que Jésus est habité par l’Esprit Saint en sorte que Jésus est relié très profondément à Dieu son Père. Cette intimité est telle que c’est l’amour du Père toujours présent à chaque moment de sa vie qui va conduire ses choix ; c’est la conscience vive d’être aimé par son Père qui, rejoignant son propre désir va diriger sa vie.

Ce qui a soutenu Jésus dans la tentation, c’est aussi la Parole de Dieu. Jésus est familier de cette Parole aussi cette parole lui revient spontanément en mémoire pour contrer le tentateur quand pour s’opposer à la tentation de changer les pierres en pain, Jésus cite le livre du Deutéronome : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur » (Dt 8, 3).

 

C’est pourquoi, en ce premier dimanche de Carême, nous pouvons, à l’exemple de Jésus nous appuyer sur l’Esprit Saint qui habite en nous comme le dit fortement l’apôtre Paul : « Ne savez-vous pas que vous êtes un sanctuaire de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » (1 Co 3, 16). Cet Esprit peut nous conduire à une plus grande intimité avec Dieu, à être mieux « ajusté » à ce Dieu qui nous aime et donc plus fort pour choisir le chemin du désir de Dieu.

Nous pouvons aussi comme Jésus nous appuyer sur la Parole de Dieu. La Parole de Dieu est une lumière sur nos pas comme le dit le psaume 118 : " Ta parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route » (Ps 119/118, 105). La Parole de Dieu peut nous indiquer le vrai chemin, celui à la fois de notre véritable humanité et celui du désir de Dieu.

 

Alors, pendant ce Carême qui est un temps de libération, avançons paisiblement mais avec courage pour être cette femme et cet homme nouveaux dont parle Saint Paul : « Laissez-vous renouveler par la transformation spirituelle de votre pensée. Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité » (Ep 4, 23-24). Cette transformation nous est offerte chaque jour comme au jour de Pâques.

Publié dans Evangile de Matthieu

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