Fête du Corps et du Sang du Christ

Publié le par Père Maurice Fourmond

Luc 9, 11b-17

Homélie

 

L’évangile de cette fête nous rapporte le récit de la multiplication des pains dans l’évangile de Luc. Le début du récit nous montre Jésus qui refuse de renvoyer les gens et qui invite ses apôtres à leur donner eux-mêmes à manger. Les apôtres disent qu’ils n’ont presque rien ; alors s’organise le repas miraculeux.


Ce qui est premier dans ce récit, c’est le souci de Jésus de nourrir la foule ; ce qui intéresse Jésus c’est le bien des gens. Il pense à cette double nourriture : la nourriture matérielle indispensable et, tout aussi indispensable, la nourriture spirituelle. Si Saint Luc n’a qu’un seul récit des pains multipliés, il y en a deux chez Matthieu et Marc et dans ce second récit, la préoccupation de Jésus est encore plus marquée que dans la première multiplication. Nous voyons Jésus s’inquiéter pour cette foule qui l’a suivi : “Je ne veux pas les renvoyer à jeun : ils pourraient défaillir en chemin” Mt 15, 32. Nous voyons que si Jésus annonce l’amour de Dieu, répondant à la vocation de toute personne humaine, il est aussi préoccupé de la faim matérielle des hommes. Ces récits nous ont été rapportés à l’évidence pour annoncer le repas de la dernière Cène et l’institution de l’eucharistie, mais il ne serait pas juste de ne retenir dans l’attention de Jésus aux gens que leur faim spirituelle.

 

Toute la vie de Jésus nous montre que Jésus s’intéresse à l’homme dans sa totalité, il ne cherche qu’à lui permettre de réaliser sa pleine humanité. C’est ainsi que Jésus tout en annonçant la vérité du Royaume de Dieu, est plein de compassion pour les gens, guérissant les malades sans séparer une nourriture de l’autre. C’est d’ailleurs la première phrase de notre évangile : “Jésus parlait du règne de Dieu à la foule, et il guérissait ceux qui en avaient besoin”. On voit les deux aspects de la mission de Jésus et de la nôtre : parler du règne de Dieu et soutenir ceux qui sont dans le besoin. Comme le dit le Père Albert Rouet, évêque de Poitiers : “Si on n’est pas prêt à partager la vie des gens, si on n’est pas prêt à s’engager avec eux, à peiner avec eux, à travailer avec eux, à se battre avec eux, à espérer avec eux, à souffrir avec eux, on n’a rien à leur dire de vital” (p. 62 dans “J’aimerais vous dire”). C’est exactement ce qu’a fait Jésus.


Jésus a partagé en tout notre vie et il donné sa vie pour que les hommes vivent. C’est la vie des gens qui intéresse Jésus. Quand Jésus dans son enseignement affirme : “Ne craignez pas ceux qui tuent le corps mais ne peuvent tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut faire périr âme et corps dans la géhenne” Mt 10, 28, Jésus parle de l’homme total qu’il convient d’aider à vivre.


Certes, il y a une hiérarchie de valeurs : si on nourrit le corps tout en détruisant l’âme, on est à l’opposé de la volonté du Christ Jésus. On ne peut séparer l’âme et le corps comme l’ont affirmé certaines hérésies manichéennes. Ainsi que le disait Dom Helder Camara : “Comment annoncer la Bonne Nouvelle, l’évangile à des personnes qui sont dans des situations de sous humanité”. Si Jésus entend nourrir l’homme intérieur selon Dieu, sa vie nous montre qu’il s’est soucié de l’homme intégral. C’est le sens de toute sa vie, c’est le sens de l’Eucharistie.


Il y a deux aspects majeurs dans l’Eucharistie, correspondant d’ailleurs aux deux commandements inscrits dans l’évangile : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Mais Jésus ressuscité les acomplit en plénitude. Il accomplit pleinement l’amour du Père en remettant toute sa vie entre les mains de la tendresse du Père. Il accomplit pleinement l’amour du prochain en offrant toute sa puissance de vie à ses frères et soeurs que nous sommes. Dans l’Eucharistie, nous vivons ces deux mouvements : avec le Christ, nous présentons au Père ce que nous sommes avec nos générosités et nos faiblesses, nous entrons dans l’amour de Jésus pour son Père. Et, recevant la force de vie de Jésus vivant, nous devenons d’autres Christ pour ceux que le Seigneur met sur notre route. Ainsi l’eucharistie nous invite à vivre comme le Christ dans l’ouverture du coeur à Dieu notre Père  et dans l’ouverture du coeur à nos frères et soeurs en humanité.


Nous reprendrons comme chant après la communion cette parole merveilleuse de Saint Augustin disant à ceux qui allaient recevoir le corps du Christ : “Recevez ce que vous êtes, devenez ce que vous recevez”. Dans l’eucharistie, nous sommes le corps du Christ, un corps d’action de grâce et, en communiant, nous devenons le corps du Christ, un corps plein d’attention et de don pour les autres. Ce n’est pas pour rien si l’Église a choisi ce week-end pour le festival de la charité.


L’Eucharistie est vraiment nourriture pour notre vie : elle nourrit notre prière et elle nourrit notre charité. C’est ainsi que nous sommes les membres d’un même corps, le corps du Christ 

Publié dans Homélies du dimanche

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