Les invités aux noces

Publié le par Père Maurice Fourmond

28è dimanche Année A

Homélie

 

Matthieu 22, 1-14

 

C’est un évangile un peu curieux. Déjà, pourquoi les invités maltraitent-ils les envoyés du roi et ne se contentent pas de décliner l’invitation ? Pourquoi, suite à la défection des premiers invités, les serviteurs vont-ils inviter toutes les personnes rencontrées en spécifiant «les mauvais comme les bons» ? Enfin pourquoi le roi reproche-t-il à l’un des convives recruté dans la rue de n’avoir pas revêtu le vêtement de noces et le fait jeter dans les ténèbres extérieures ?


Nous nous posons toutes ces questions parce que nous lisons ce texte en nous attachant au sens immédiat des mots. Mais il s’agit d’une parabole qu’il faut donc lire, non pas avec nos lunettes de rationalistes, de raisonneurs, avec notre culture occidentale, mais en recherchant quel en est la signification symbolique et ce que Jésus veut nous dire aujourd’hui à travers ce langage énigmatique.


Le voile se déchire un peu quand on comprend que Jésus adressait cette parabole à ses compatriotes, le peuple d’Israël. L’invitation du roi aux noces de son fils fait allusion à l’invitation de Dieu faite au peuple élu d’Israël. Mais le peuple n’a pas compris l’invitation à la conversion qui lui était faite par l’intermédiaire de nombreux prophètes. Et nous savons que beaucoup de ces prophètes ont été tués comme Jésus le rappelle avec tristesse devant sa ville sainte : «Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous son aile, et vous n’avez pas voulu !» Mt 23, 37. Ainsi les auditeurs de Jésus ont très bien compris cet aspect de la parabole.


Mais pour nous aujourd’hui, que signifie cette parole de l’évangile ? À nous aussi sont envoyés des prophètes non seulement pour nous inviter à partager le repas du Seigneur, mais pour reconnaître le passage de Dieu dans notre vie, pour reconnaître l’appel de l’Esprit Saint à la sainteté. Et nous avons bien souvent de faux prétextes pour justifier notre surdité spirituelle. Certes, il convient de savoir discerner la qualité et la vérité du message, mais lorsque, avec l’aide de l’Esprit Saint, nous avons reconnu que Dieu nous invite à grandir sur le chemin de notre sainteté, il convient de répondre généreusement à cette invitation en faisant confiance à ce Dieu qui nous fait confiance.

 

L’autre interrogation concerne l’invitation faite «aux mauvais comme aux bons». Mais n’est-ce pas merveilleux de reconnaître dans cette parole l’amour universel de notre Dieu, de savoir que Dieu ne choisit pas quelques uns d’entre nous, les meilleurs, pour en écarter d’autres,. N’est-ce pas merveilleux de savoir que nous sommes tous concernés par l’invitation de Dieu quelques soient les chemins que nous suivons. C’est une grande espérance de savoir que je suis invité par Dieu alors qu’il y a en moi sans doute du bon, mais aussi du mauvais. C’est une grande espérance de savoir que chaque être humain est sollicité par Dieu quelque soit la route sur laquelle sa naissance, sa culture, ses habitudes l’ont placé. L’invitation de Dieu s’adresse à tous et il n’est pas rebuté par nos faiblesses lui qui «s’est dépouillé prenant la condition de serviteur... devenant obéissant jusqu’à la mort» Ph 2, 7-8. afin précisément que tous puissent entendre l’invitation de son Père. Cela doit changer notre regard sur ceux qui nous entourent. Si Dieu les invite malgré ce mauvais que peut-être je remarque, c’est que Dieu espèrent en eux. Si Dieu espère dans mon frère, dans ma soeur que je juge sévèrement, comment je peux ne pas les regarder comme Dieu les regarde avec la même espérance, le même amour.


Ajoutons que le désir du roi était de remplir la salle des noces. Quand on sait que, pour Dieu, la salle des noces est grande à la mesure de son amour infini, on ne peut pas ne pas se réjouir de ce désir de Dieu de réunir tous ses enfants.


Quant à la dernière partie de notre évangile, les exégètes nous expliquent que cette partie a été ajoutée à la parabole par l’évangéliste Matthieu pour répondre à une situation de sa communauté. Celle-ci en effet avait une mauvaise conception de l’universalité du salut voulu par Dieu. En effet, certains chrétiens disaient : «Si tout le monde est invité au festin du Royaume, si tout le monde, les mauvais et les bons sont admis à entrer dans la salle du festin, alors ce n’est pas la peine de se fatiguer et on peut prendre à la légère les exigences de l’évangile». Matthieu va répondre en ajoutant un propos sur le «vêtement de noces» pour dire à ses amis chrétiens, comme à nous aujourd’hui : «Oui, le salut est offert à tout le monde, oui, le salut est gratuit et ne dépend pas de nos mérites, mais si vous aimez le Seigneur, vous devez tout faire pour tenter de répondre à l’amour qu’il vous porte».


Alors, en cette eucharistie, rendons grâce à Dieu d’avoir été invités à ce repas dont la nourriture est la vie même du ressuscité ; puisons dans cette nourriture la force d’un amour qui va s’efforcer de répondre à l’amour de notre Dieu et Père à travers les multiples invitations qu’il ne cesse de nous adresser dans le quotidien de nos vies.

Publié dans Homélies du dimanche

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :