Abondance 2017. 6 - J’ai la responsabilité d’être témoin de l’espérance

Publié le par Père Maurice Fourmond

Abondance 2017
6ème jour

6 - J’ai la responsabilité d’être témoin de l’espérance

Questions pour la réflexion personnelle
    - Ai-je à témoigner non seulement de mes espoirs humains, mais de mon espérance de croyant ? Voyez-vous une différence entre les deux ?
    -Comment concrètement je témoigne de mon espérance ?


Exposé :

    La mission que Jésus a confiée à ses amis en continuité avec sa propre mission consiste pour une part importante à témoigner de l’espérance. C’est ce que l’apôtre Pierre nous demande dans sa première lettre : « Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ; mais faites-le avec douceur et respect » 1 Pi 3, 15-16. Nous avons déjà parlé de l’espérance du Christ Jésus en montrant que Dieu son Père était toujours avec son Fils bien aimé. Réfléchissons à nouveau sur la façon dont Jésus a vécu l’espérance afin de comprendre ce qui est demandé aux disciples de ce Seigneur.

1 - L’espérance de Jésus.
    a) Ce n’était pas un espoir humain
Nous l’avons déjà souligné les jours précédents. Alors, comment Jésus a-t-il témoigné de l’espérance qui l’habitait ? Pour ce qui est de sa vie publique, il est clair que le Christ ne confondait pas ses espoirs humains et l’espérance qui l’habitait. Sans arrêt Jésus souligne à quel point les espoirs purement humains qu’il aurait pu concevoir, étaient à la fois dérisoires, hors de la mission qui lui était impartie et sans cesse déçus. Dans les trois tentations de Jésus au début de sa vie publique, le tentateur lui propose un espoir humain, la réussite de sa mission, mais par des moyens contraires à ce qu’il devait accomplir selon le projet de Dieu. Jésus va rejeter ces tentations et refuser l’espoir que le tentateur lui suggère.

    Même les espoirs légitimes concernant ses amis ou l’accueil de sa parole ont été déçus. Que ce soit la compréhension de sa mission par ses plus proches amis, ou même leur fidélité, que ce soit l’accueil de sa parole auprès des chefs religieux de son peuple, dans tous ces domaines, tout espoir humain a été déçu. En voici quelques exemples. En ce qui concerne la compréhension de son message par ses amis rappelons-nous les paroles de Pierre lorsque son maître tentait d’annoncer que sa mission le conduirait à la souffrance et à la mort : « Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches : « Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. Mais lui, se retournant, dit à Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute : tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes » Mt 16, 22-23. Quant à la fidélité de ses plus proches disciples, Jésus a été bien déçu : l’un d’eux l’a trahi, tous l’abandonnent lors de son arrestation et Pierre le reniera dans la cour du grand prêtre.

    D’autre part, en de nombreuses occasions, Jésus va exprimer sa douleur ou même sa colère devant l’endurcissement du coeur de ceux qui étaient pourtant de fervents croyants comme certains pharisiens ou sadducéens, par exemple en Marc : "Alors, promenant sur eux un regard de colère, navré de l’endurcissement de leurs cœurs » Mc 3, 5. Si Jésus n’avait eu que des espoirs humains, il aurait été bien déçu.

    b) Sur quelle espérance Jésus fondait sa vie ?
L’espérance de Jésus vient seulement de la présence en lui de Dieu son Père. Nous l’avons déjà évoqué, l’espérance de Jésus se situe seulement dans la présence fidèle d’un Père dont il est sûr de l’amour. Cette espérance s’exprime lorsque Jésus dit qu’il fait toujours la volonté de son Père. Par exemple : « Jésus leur dit : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre » Jn 4, 34. Ou encore : « Mon jugement est juste, parce que je ne cherche pas à faire ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé » Jn 5, 30. « Car je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé » Jn 6, 38. Lorsque Jésus dit que la volonté de son Père est ce qui le fait agir, il dit en substance que c’est là qu’il place toute l’espérance de sa vie.

    D’autre part, cette espérance de Jésus est confirmée par les oeuvres que Jésus accomplit. L’espérance de Jésus en Dieu son Père lui ouvrait un avenir éternel. Là encore nous en trouvons l’affirmation dans de nombreuses paroles du Seigneur : cet avenir était la participation à la vie même de Dieu qu’il exprime dans cette phrase étonnante et capitale : « Le Père et moi, nous sommes un » Jn 10, 30 ou encore dans sa prière avant son arrestation : « Maintenant, ils ont reconnu que tout ce que tu m’as donné vient de toi... Tout ce qui est à moi est à toi, et ce qui est à toi est à moi ; et je suis glorifié en eux » Jn 17, 7...10. Or les oeuvres de Jésus ne sont rien d’autres que d’ouvrir à ceux qui sont faibles, malades, pécheurs un avenir. Ouvrir un avenir à quelqu’un, c’est lui redonner l’espérance. N’est-ce pas ce que Jésus n’a cessé de faire en guérissant les malades, en s’invitant chez Zachée, en ne condamnant pas la femme adultère.
    
    c) Cette espérance lui permet d’aller jusqu’au bout de sa mission.
C’est cette espérance qui habitait Jésus qui lui a donné la force d’aller jusqu’au bout : « Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout » Jn 13, 1. Curieusement le récit des disciples d’Emmaüs montre à la fois comment l’espérance en Dieu a conduit Jésus jusqu’à la mort et la résurrection : « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? » Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait » Lc 24, 26-27 ; mais le récit montre aussi comment cette espérance de Jésus s’est transmise au coeur des deux disciples : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem » Lc 24, 32-33. 
    Jésus exprimera la vérité de son espérance quand sur la croix il dira : « Tout est accompli » Jn 19, 30. Affirmant l’accomplissement de sa vie, Jésus signe la vérité de son espérance.

2 - Le don de l’Esprit Saint
    « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité » Jn 14, 15-17. L’espérance de Jésus est communiquée à ses disciples à travers le don de l’Esprit Saint. C’est une des dernières paroles de Jésus avant de quitter visiblement ses amis ; au début de Actes des Apôtres il leur dit : « Mais vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » Ac 1, 8. Cette présence en chacun de nous de l’Esprit de Jésus nous assure du soutien de Dieu à travers toute notre vie. Ce don de l’Esprit exprime et même avec une force incomparable la promesse de Dieu que nous avons développée dans notre 3ème rencontre : « Je serai avec toi ». Dieu réalise pour chacun de nous cette promesse par de don d’un Esprit qui est un Esprit d’amour, cette présence de cet amour qu’est Dieu, source de notre espérance.

3 - Comment nous, disciples de Jésus, pouvons-nous être témoins de l’espérance ?

    a) Ouvrir un avenir
De même que l’espérance de Jésus s’est traduite pour ceux qui l’entouraient en leur ouvrant un avenir, de même nous témoignerons de notre espérance chrétienne en essayant d’ouvrir un avenir à ceux dont la vie est fragile et pour eux apparemment fermé. C’est tout le sens du soutien aux plus démunis de notre monde, ce que le Pape François ne cesse d’inviter les chrétiens. C’est tout le sens de nos engagements humanitaires, politiques, sociétaux. C’est tout le sens des relations fraternelles qu’il nous est donné de vivre chacun selon ce qu’il est et dans le contexte où il est situé.
    Ouvrir un avenir est aussi notre responsabilité devant les conflits, les blessures, les violences qui abîment les personnes et les groupes. C’est le sens de l’effort qui nous est demandé pour la construction d’une paix juste. C’est aussi l’impératif du pardon qui se définit précisément comme ouvrant un avenir à celui qui m’a blessé.

    b) L’eschatologie chrétienne interroge et provoque le présent de nos vies
Nous avons déjà parlé hier de l’eschatologie comme accomplissement de notre transformation en cet amour qu’est Dieu. Je voudrais simplement montrer que cette perspective nourrit notre espérance et interroge notre façon de vivre aujourd’hui. Elle nourrit bien sûr notre espérance, car cette transformation intérieure est certes une décision de notre part, mais nous savons que cette transformation est principalement l’oeuvre de l’Esprit Saint. Cette transformation par et dans l’amour qu’est Dieu interroge et provoque notre manière de vivre : dans notre vie quotidienne, quelle place nous donnons à une amour vrai, gratuit ? N’est-ce pas dans l’amour que nous donnons à nos frères et soeurs humains que nous pourrons témoigner le mieux de la présence de Dieu au coeur de nos vies et donc de l’espérance qui nous fait vivre ? N’est-ce pas ainsi que cette espérance pourra un peu se communiquer à d’autres et construire le véritable projet de Dieu : un monde fraternel ?

    c) Nous serons témoins de l’espérance chrétienne en témoignant de ce qui pour nous est essentiel. 
Dans ce qu’il est convenu d’appeler la prière sacerdotale de Jésus avant son arrestation, le Christ prie ainsi : « Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais. Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde. Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde. Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité » Jn 17, 15-19. Saint Paul explicitera les paroles de son maître dans sa lettre aux Colossiens : « Si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. En effet, vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu« Recherchez les choses d’en haut » Col 3, 1-3.
    Ces paroles nous interrogent sur l’orientation de nos vies, sur la valeur d’éternité de nos comportements et donc sur la crédibilité du témoignage d’espérance qui nous est demandé de rendre.

    d) Comme Jésus, comme tant et tant de disciples du Christ, il nous faut témoigner de l’espérance chrétienne y compris dans les difficultés et les épreuves de nos vies. Alors même que nous sommes abattus, nous pouvons témoigner d’une paix intérieure qui nous vient de la présence de Dieu en nous. C’est ce que disait l’apôtre Paul « Car Dieu qui a dit : ‘Du milieu des ténèbres brillera la lumière’, a lui-même brillé dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ. Mais ce trésor, nous le portons comme dans des vases d’argile ; ainsi, on voit bien que cette puissance extraordinaire appartient à Dieu et ne vient pas de nous. En toute circonstance, nous sommes dans la détresse, mais sans être angoissés ; nous sommes déconcertés, mais non désemparés ; nous sommes pourchassés, mais non pas abandonnés ; terrassés, mais non pas anéantis. Toujours nous portons, dans notre corps, la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus, elle aussi, soit manifestée dans notre corps. En effet, nous, les vivants, nous sommes continuellement livrés à la mort à cause de Jésus, afin que la vie de Jésus, elle aussi, soit manifestée dans notre condition charnelle vouée à la mort » 2 Co 4, 8-11.

    Notre espérance est en effet absolue et nous pouvons reprendre à notre compte ces paroles d’espérance de l’apôtre Paul aux chrétiens de Rome : « J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur » Rm 8, 38-39.

Publié dans Conférences

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